Le futur système de transport de l’UE doit exploiter le potentiel de l’intermodalité

Les participants à la table ronde d’experts organisée par le Comité économique et social européen (CESE) soulignent que les Européens verront uniquement un réel avantage à combiner plusieurs moyens de transport (aérien, maritime ou terrestre) si ces moyens sont fiables, flexibles et abordables.

Pour évoluer dans la bonne direction, le système de transport de l’Union européenne doit se tourner vers le transport intermodal et la logistique multimodale, mais certains obstacles pratiques entravent encore le déploiement de ces systèmes et doivent être surmontés. Telle est la conclusion globale tirée à l’issue de la table ronde d’experts organisée le 24 juin 2021, à la fois en présentiel à Bruxelles et à distance, par la section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» (section TEN) du CESE.

L’intermodalité permet un transport rapide, efficace et intégré des passagers et du fret au moyen d’un large éventail de modes de transport, y compris le transport aérien, maritime, ferroviaire et routier. Pour tirer parti du transport multimodal, il faut combiner aussi efficacement que possible plusieurs moyens de transport, en profitant des atouts de chaque mode de transport, tels que la commodité, la vitesse, le coût, la fiabilité et la prévisibilité. Cette multimodalité contribue à son tour à la durabilité environnementale et réduit l’empreinte carbone du secteur, a expliqué Baiba Miltoviča, présidente de la section TEN, au cours du débat.

Résoudre les problèmes pour faire du transport intermodal la meilleure option

À l’heure actuelle, le transport intermodal est plus cher, plus lent et moins fiable que, par exemple, le transport routier unimodal. Il fait face à des difficultés telles que la longueur des trajets, la complexité, des risques accrus et une fiabilité moindre. Ces problèmes sont principalement dus à l’absence d’infrastructures de terminaux adéquates et à un manque d’investissement dans des solutions numériques intelligentes qui permettraient de rationaliser la gestion des flux de transport multimodal. L’on peut citer en exemple les connexions ferroviaires, qui sont mal adaptées à un contexte de marché ouvert. Il en résulte un service dont la ponctualité, la fiabilité, la prévisibilité et la flexibilité sont insuffisantes.

Pour trouver une solution viable à long terme permettant de développer un transport intermodal et une logistique multimodale efficaces et durables, il est indispensable de résoudre rapidement les problèmes qui affectent le niveau de service et les coûts, sans qu’il soit nécessaire de prévoir des mesures particulières, un soutien financier ou un cadre réglementaire spécifique. La multimodalité pourrait alors jouer pleinement son rôle dans le système de transport et constituer une alternative attrayante au transport routier unimodal.

Dans cette perspective, la section TEN a décidé de prendre des mesures visant à démontrer que le transport intermodal et la logistique multimodale peuvent s’avérer attractifs, sans pour autant s’appuyer sur des régimes de soutien massif qui n’ont pas apporté de réelle solution aux problèmes, mais plutôt en résolvant effectivement les problèmes qui rendent le transport multimodal plus cher, plus lent et moins fiable. Cette optique pourrait déboucher sur des solutions de transport flexibles et optimales, adaptées aux circonstances locales et caractérisées par des émissions plus faibles, a ajouté Stefan Back, vice-président de la section TEN et rapporteur de l’avis d’initiative en cours d’élaboration intitulé «Transport intermodal et logistique multimodale».

Investir dans les infrastructures pour assurer les connexions intermodales

Les participants à la table ronde ont indiqué que si l’Union entend réduire le transport routier, diminuer les émissions de carbone et atteindre la neutralité climatique d’ici 2050, conformément à ses objectifs en matière de transition verte, elle doit donner la priorité absolue à l’investissement dans les plateformes et les infrastructures de transport.

Maria Koidu, membre de la DG MOVE de la Commission européenne, a affirmé que des mesures de soutien seront nécessaires pour garantir l’essor du transport intermodal et de la logistique multimodale d’ici 2050. Elle a souligné que le potentiel de l’intermodalité est freiné par le fait que de nombreux États membres de l’Union ont, outre des terminaux très médiocres, une législation inefficace en ce qui concerne les différents modes de transport, ces lacunes venant s’ajouter aux coûts considérables liés au transbordement.

Ralf-Charley Schultze, de l’Union internationale pour le transport combiné rail-route (UIRR), a pointé du doigt la nécessité de mettre en place des mesures temporaires qui, en mettant à profit la dynamique induite par le pacte vert pour l’Europe et les mesures incitatives qui en découlent, pourraient contribuer au renforcement des capacités d’infrastructure.

Nicolette van der Jagt, représentante de l’Organisation européenne des activités d’expédition, de transport, de logistique et de douane (CLECAT), a principalement abordé la qualité des services offerts et a plaidé énergiquement en faveur d’une approche axée sur le client et l’amélioration continue.

Enfin, Martin Mayer, membre du conseil syndical de Sheffield, a déclaré qu’il était essentiel d’analyser des exemples de zones dans lesquelles le transport multimodal fonctionne déjà et d’en comprendre les raisons, puis de déterminer les corridors spécifiques dans lesquels il convient d’investir.

Toutes ces contributions vont à présent alimenter l’avis du CESE, dont l’adoption est prévue lors de sa session plénière de juillet.

Contexte

Le transport intermodal peine à se développer, malgré les progrès significatifs accomplis ces dernières années, notamment dans le cadre de la directive sur les transports combinés. Jusqu’à présent, les mesures de soutien ont pris la forme d’incitations fiscales et d’un traitement spécial en ce qui concerne l’accès au marché. Le problème semble résider, d’une part, dans l’efficacité générale de l’un ou plusieurs des modes concernés (en ce qui concerne la qualité, la rapidité et la ponctualité des services), et d’autre part, dans des ressources de transbordement insuffisantes et inférieures aux normes.

La récente communication de la Commission européenne intitulée «Stratégie de mobilité durable et intelligente» et présentée en décembre 2020 souligne la nécessité d’améliorer la coordination entre les États membres en ce qui concerne la construction de terminaux intermodaux. Elle propose également un certain nombre de simplifications administratives et soulève l’importance d’une approche axée sur les actions de promotion, avec notamment des règles spécifiques sur l’accès au marché, en particulier pour les segments de transport terrestre. Dans le plan d’action qui accompagne cette stratégie, la Commission affirme son intention de procéder à un réexamen du cadre réglementaire pour le transport intermodal en 2022.