European Economic
and Social Committee
L’engagement des citoyens dans la lutte contre la désinformation
Le Comité économique et social européen (CESE) a tenu une conférence qui a mis en évidence l’importance de l’engagement des citoyens dans la lutte contre la désinformation. L’amélioration de l’éducation aux médias, la stimulation de la pensée critique, la promotion de la communication active et le recours aux bienfaits de l’intelligence artificielle renforcent la résilience des sociétés face aux fausses informations et à la propagande toxique.
Intitulée «Les citoyens face à la désinformation» et tenue à Lisbonne le 22 mai 2025, cette conférence était la quatrième organisée dans le cadre du projet en cours du CESE visant à lutter contre la désinformation avec l’aide de la société civile. Elle a été mise sur pied en coopération avec le Conseil économique et social du Portugal et avec le soutien de la représentation de la Commission européenne et du bureau du Parlement européen à Lisbonne.
Les nouvelles technologies sont utilisées pour diffuser de fausses informations, un problème de société majeur qui compromet la qualité de la démocratie et du débat public et exerce un effet fortement clivant sur les populations. Selon Luís Pais Antunes, président du Conseil économique et social du Portugal, tant la désinformation et le manque d’informations que l’excès d’informations constituent, pour les sociétés modernes, autant de défis potentiellement colossaux, qui, pour être relevés, nécessitent la participation de la société civile.
Soulignant le rôle fondamental des citoyens dans ce combat, Oliver Röpke, président du CESE, a déclaré: «Dans notre lutte contre la désinformation, nous devons donner aux citoyens et à la société civile les moyens d’agir non seulement en tant que gardiens, mais également en tant qu’acteurs de la résilience démocratique. Le CESE s’est engagé en faveur d’une approche participative à plusieurs niveaux. Notre série de conférences “Les citoyens face à la désinformation” contribue à bâtir un front uni sur des valeurs de transparence, de coopération et de confiance. Le dialogue doit prévaloir sur la division. Il en va de la défense de la démocratie.»
Sofia Moreira De Sousa, cheffe de la représentation de la Commission européenne au Portugal, a ensuite évoqué la menace qui pèse sur l’un des principes fondamentaux de l’Union, la liberté de choix: «Il ne saurait être question de liberté de choix lorsque nos décisions sont biaisées et reposent sur de fausses informations.»
Tant l’Union européenne que les États membres ont pris des mesures visant à lutter contre la désinformation au moyen de différents outils, comme l’Observatoire européen des médias numériques, le règlement sur les services numériques et le bouclier européen de la démocratie.
Siim Kumpas, chef de l’équipe «Politique, stratégie et partenariat» du Service européen pour l’action extérieure (SEAE), est venu faire part de la mise au point par son équipe d’un nouvel instrument, la boîte à outils relative aux activités de manipulation de l’information et d’ingérence menées depuis l’étranger. L’élaboration de cet instrument constitue une étape importante dans la mise en place d’une approche de proximité et d’un véritable réseau de défenseurs de la lutte contre lesdites activités, composé d’acteurs de la société civile et d’autres parties prenantes. De son côté, le projet EUvsDisinfo a permis de recenser et de démentir pas moins de 19 031 cas de désinformation jusqu’à présent.
La désinformation jouant sur les émotions, il est important de prendre ses distances quelques instants avant de réagir à un contenu. Les participants ont bien insisté sur l’importance de s’interroger sur l’intention et la source des informations lorsqu’un contenu suscite l’adhésion du public. La seule manière d’éviter que ces contenus ne gagnent en visibilité et ne deviennent viraux est de ne pas y réagir.
La conférence a mis en évidence l’importance d’unir nos forces, les différents intervenants soulignant que la seule manière de vaincre la désinformation au profit d’informations fiables et fondées sur des faits était d’agir ensemble, d’associer la société civile de manière systématique et de proposer des plans d’action en faveur de l’éducation aux médias et d’un cadre législatif solide.
La formation et l’éducation aux médias sont des éléments incontournables de la lutte contre les fausses informations, et il est essentiel de sensibiliser les citoyens à la manière dont ils peuvent vaincre la désinformation en employant les outils adéquats. Tel est l’objectif du projet FACT, de l’Instituto Marquês de Valle Flôr, qui apprend aux jeunes à repérer et réfuter les informations fausses et trompeuses. Sa représentante, Cátia Lopes, a expliqué que les activités proposées consistaient notamment à leur montrer comment s’assurer de la véracité des informations, précisant ensuite que les stratégies devaient toujours s’inscrire dans une volonté d’éduquer en faisant preuve d’empathie, et que tous les acteurs de la société civile et des pouvoirs publics devaient être associés à la lutte contre la désinformation.
«L’éducation aux médias doit être enseignée dès l’école, et c’est là que l’État doit intervenir. La démocratie repose sur la crédibilité», a affirmé Aimilios Perdikaris, président du conseil d’administration et directeur général de l’Agence de presse d’Athènes-Macédoine.
Dans le même ordre d’idées, Carlos Abreu Amorim, secrétaire d’État adjoint du Portugal chargé des affaires parlementaires, a fait part de la volonté du gouvernement portugais de continuer d’investir dans des outils de vérification des faits et de présenter un plan d’action en faveur de l’éducation aux médias. «Il ne peut y avoir de démocratie sans information libre ni médias indépendants, impartiaux et critiques», a-t-il déclaré, ajoutant que le gouvernement continuerait de s’aligner sur les réglementations de l’Union. Il renforcera dans le même temps l’éthique journalistique, en ayant toujours à l’esprit que «le manque de confiance envers le journalisme est l’allié numéro un de la désinformation».
À cet égard, Luísa Meireles, responsable principale de l’information auprès de l’agence de presse portugaise Lusa, a déploré le fait que la crise du journalisme ait remis en cause les conditions préalables à la vérification des faits. «Aujourd’hui, le meilleur journaliste est celui qui publie le premier, et non celui qui publie des contenus sûrs, une tendance préjudiciable qui repousse la vérification des faits à un stade ultérieur.»
À propos de l’intelligence artificielle et de l’immense défi qu’elle représente face au problème de la désinformation, Niko Efstathiou, journaliste invité de l’Institut Reuters pour l’étude du journalisme à Oxford, a affirmé que si elle était capable de créer des hypertrucages (ou «deep fakes») convaincants afin de diffuser des campagnes d’une extrême précision à l’attention des populations les plus vulnérables, elle pouvait également se révéler très utile pour analyser les contenus et détecter la mésinformation en temps réel.
Malgré les voix qui se lèvent contre l’imposition de règles et accusent l’Union de censure, la réglementation peut être un instrument redoutable dans cette lutte. C’est ce qu’a expliqué Alfredo Sousa De Jesus, chef du bureau du Parlement européen à Lisbonne: «Ce n’est pas à cause d’une absence de réglementation et de règles que l’Union peine à lutter contre la désinformation, mais en raison des nombreuses possibilités dont dispose la désinformation pour se propager.»
Exprimant un point de vue optimiste sur la lutte contre la désinformation, Katarzyna Szaran, directrice du département de la communication stratégique au ministère polonais des affaires étrangères, a déclaré: «Il existe des solutions à ce problème bien connu. L’approche fondée sur la société civile, la législation et les initiatives politiques ont leur importance, mais nous devons tous œuvrer main dans la main.» Le Conseil pour la résilience mis sur pied par la présidence polonaise a pour but de faciliter la coopération avec des experts de différents domaines afin de rassembler des idées et des solutions, en se concentrant sur le renforcement de l’habileté numérique. «C’est pourquoi nous proposons maintenant de porter cette initiative au niveau de l’Union», a-t-elle conclu.
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