Le CESE s’associe aux critiques envers le règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE) et plaide en faveur d’une approche plus globale

Ces critiques, portées par la société civile, concernent essentiellement les questions de légitimité, de cohérence et de transparence de ce système d’arbitrage. Il faut élaborer un nouveau modèle de gouvernance des investissements internationaux qui comble l’écart important entre, d’une part, le système d’investissement, et, d’autre part, la protection efficace des droits des travailleurs et de l’environnement.

Le règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE) est un dispositif présent dans de nombreux accords de libre-échange et accords internationaux d’investissement, permettant de régler les litiges relatifs à la mise en œuvre des accords de protection des investissements.

Le système a fait l’objet de nombreuses critiques de la part de la société civile, a déclaré Christophe Quarez, rapporteur général et membre du CESE, rappelant les débats sur le projet d’accord entre l’Union européenne et les États-Unis, à savoir le célèbre partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI).

L’avis d’initiative intitulé «Cour multilatérale d’arbitrage entre investisseurs et États: bilan et réalisations du processus de la CNUDCI à la lumière des recommandations de la société civile», adopté par le CESE durant sa session plénière d’octobre, vise à explorer le processus de réforme et de modernisation de ce mode de règlement des différends, dans lequel la Commission européenne joue un rôle central et sur lequel la Commission des Nations unies pour le droit commercial international (CNUDCI) travaille actuellement.

Comme M. Quarez l’a souligné, la remise en cause par l’arbitrage de décisions démocratiques portant sur la protection de l’environnement, des droits sociaux ou de la santé a été largement critiquée. De même, des questions sur l’indépendance et la légitimité des arbitres, ainsi que sur la transparence et le coût de la procédure sont fréquemment soulevées.

Le CESE réaffirme la nécessité de disposer d’un système de protection des investissements internationaux moderne, efficace et opérationnel, assorti d’un mécanisme de règlement des différends. Parallèlement, il regrette que le droit international n’exige pas l’épuisement des voies de recours internes.

C’est pourquoi le Comité rappelle sans cesse à la Commission qu’il a demandé à être davantage associé à ses travaux dans le cadre de la CNUDCI, en l’encourageant à défendre la question de l’épuisement des voies de recours locales avant toute saisine internationale. Le système actuel s’avère discriminatoire à l’encontre des PME compte tenu de leurs moyens financiers limités. Le RDIE devrait être reconnu comme une voie de recours extraordinaire.

En conséquence, le Comité fait valoir qu’à ce stade, les activités de la CNUDCI devraient se concentrer davantage sur les questions de fond que sur les questions de procédure, même si elles restent importantes. Parmi les questions de fond cruciales, citons les dispositions vagues ou trop étendues en matière de traitement juste et équitable.

La nécessité d’une approche globale cohérente avec les objectifs de développement durable et de justice sociale

Les problèmes les plus fréquemment recensés concernent le manque de transparence dans les litiges en matière d’investissement, le manque de cohérence et de prévisibilité des décisions d’arbitrage, le rôle et l’indépendance des arbitres et les clauses du RDIE qui contiennent des concepts vagues ou trop étendus pouvant être source d’insécurité juridique et d’abus potentiel.

Aujourd’hui, l’opinion publique perçoit un fossé important entre la protection des investissements, qui jouit d’une force juridique obligatoire et celle des droits humains, sociaux, environnementaux ou sanitaires, dont les dispositifs internationaux ne sont pas ou peu contraignants.

À l’instar de la commission du commerce international (INTA) du Parlement européen, le CESE considère que la politique de l’Union en matière d’investissements doit certes répondre aux attentes des investisseurs et des États bénéficiaires, mais également aux intérêts économiques plus généraux de l’Union, à ses objectifs de politique extérieure et à ses priorités, notamment en matière de protection de l’environnement et des droits fondamentaux.

Assurer la cohérence entre les objectifs de développement durable ambitieux dont l’Union européenne s’est dotée et le cadre de la réforme du modèle de RDIE peut aider la société à faire face aux défis actuels.

L’objectif commun est de trouver un équilibre entre la protection des investissements et celle de l’intérêt général, précise M. Quarez, ajoutant que les interventions de l’ensemble des parties prenantes, y compris les résidents locaux, les travailleurs, les syndicats, les groupes de défense de l’environnement et les consommateurs, doivent être dûment prises en considération par les cours d’arbitrage entre États et investisseurs.

Le CESE encourage la Commission à veiller à ce que les questions de nature plus transversale comme l’effet dissuasif du RDIE, l’épuisement des voies de recours locales et l’accès de tiers tels que les communautés locales concernées par les investissements restent sur la table et soient traitées comme il se doit.

Pour qu’un processus multilatéral de réforme du RDIE puisse réellement faire la différence, le CESE estime essentiel d’adopter une approche plus globale de la gouvernance des investissements internationaux et de s’écarter de l’arbitrage ad hoc plutôt que de se contenter de remplacer l’arbitrage en matière de RDIE par un tribunal de règlement de différends entre investisseurs et États.

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  • EESC backs criticism of investor-State dispute settlement (ISDS), and calls for a more holistic approach