European Economic
and Social Committee
L’encadrement des aides d’État dans le cadre du pacte pour une industrie propre: Entre ambition verte et renforcement du marché unique
Le CESE a adopté un avis dans lequel il expose son point de vue sur la manière dont la Commission devrait mettre en œuvre l’encadrement des aides d’État dans le cadre du pacte pour une industrie propre (CISAF), le cadre adopté le 25 juin 2025 pour accélérer et réduire les risques liés aux investissements dans la décarbonation et les technologies propres.
À peine six semaines après son adoption, la CISAF a déjà été mise en pratique avec l’approbation par la Commission d’une mesure d’aide d’État d’un montant de 11 milliards d’euros destinée à soutenir le développement de l’énergie éolienne en mer en France.
Nous saluons la CISAF en tant qu’outil essentiel pour stimuler les investissements verts dans l’UE et apprécions son alignement sur le règlement pour une industrie «zéro net» et sa complémentarité avec le Fonds pour l’innovation. Nous apprécions également le fait que la CISAF encourage l’ajustement des systèmes fiscaux afin de promouvoir les investissements dans les technologies propres et la décarbonation industrielle au moyen de mesures telles que l’amortissement accéléré et les crédits d’impôt ciblés, ainsi que l’introduction de la possibilité d’octroyer des aides pour réduire les risques associés aux investissements privés et aux énergies renouvelables, à la décarbonation industrielle, à la fabrication de technologies propres et aux infrastructures énergétiques.
Néanmoins, nous craignons que certains indicateurs et seuils d'intensité de l'aide dans la CISAF ne reflètent pas pleinement les réalités diverses des secteurs et des régions de l'UE. Nous encourageons donc la Commission à continuer de collaborer activement avec les secteurs et les États membres.
En particulier, nous soulevons des questions sur l'impact que la CISAF peut avoir sur l'égalité des conditions de concurrence au sein du marché unique. Tout en reconnaissant son ambition, nous sommes préoccupés par les disparités en matière de capacité d’octroi d’aide entre les États membres et encourageons l’introduction de mécanismes qui récompensent la collaboration transfrontière et les projets générant des retombées positives.
En effet, depuis plus de cinq ans, la Commission applique des cadres temporaires et non temporaires pour simplifier les aides d’État aux entreprises, faire face aux crises et soutenir la transition écologique. Si l’assouplissement des règles de l’UE en matière d’aides d’État pendant la crise de la COVID-19 et la crise énergétique a aidé les États membres à se rétablir, l’utilisation des aides d’État a été inégale, créant une approche fragmentée de la politique industrielle verte européenne.
Par conséquent, il est essentiel de prévoir des incitations claires pour générer des effets d’entraînement et renforcer les chaînes de valeur européennes, tout en permettant, comme le suggère Draghi, des intensités d’aide plus élevées lorsque la coordination de l’UE est renforcée et en veillant à ce que les intensités d’aide existantes dans d’autres cas ne soient pas réduites.
À cet égard, il est particulièrement pertinent que la CISAF prévoie la possibilité pour les États membres d’introduire des mesures visant à soutenir les coûts de l’électricité pour la décarbonation des secteurs à forte intensité d’électricité. Ces mesures ont été vitales, en particulier dans un contexte de coûts élevés et de concurrence internationale. Bien qu’elles puissent être nécessaires à court terme, nous avertissons qu’elles ne doivent pas retarder la décarbonation. Il est essentiel, lors de leur conception et de leur mise en œuvre, de préserver des conditions de concurrence équitables et de veiller à ce que tous les utilisateurs à forte intensité énergétique éligibles y aient dûment accès. En outre, les possibilités de soutien public au titre de la CISAF ne devraient pas occulter la nécessité d’investissements à long terme dans les infrastructures énergétiques, qui sont essentiels pour assurer une transition énergétique résiliente et durable dans l’ensemble de l’UE.
À cet égard, nous reconnaissons que la CISAF est un instrument essentiel, mais qu'elle ne peut être comprise seule et qu'elle ne fonctionnera pas seule: le pacte pour une industrie propre (CID) comprend une série d’instruments d’investissement et de financement destinés à soutenir l’industrie européenne. Dans ce contexte, nous appelons à leur déploiement, parallèlement à un déploiement efficace du Fonds pour la compétitivité et à un cadre financier pluriannuel (CFP) renforcé afin de garantir un accès équitable au financement dans tous les États membres. De même, nous demandons à la Commission et aux États membres d'accélérer les procédures d'autorisation, de réduire les charges administratives et d'ajuster la fiscalité.
Nous prenons acte des premières mesures prises par la Commission pour simplifier l'environnement des entreprises et exhortons les États membres à les suivre.
Pour conclure, nous exprimons notre soutien à la CISAF, mais recommandons à la Commission d’évaluer l’efficacité des mesures existantes avant 2030 et de travailler avec les États membres pour renforcer le renforcement des capacités en matière d’aides d’État, améliorer la transparence, accroître la coordination et l’échange de connaissances, et renforcer le suivi.
Isabel Yglesia Julià, rapporteure de l’avis INT/1091 et membre du groupe des employeurs du CESE