Politique industrielle à l’horizon 2030

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Avis du CESE: Politique industrielle à l’horizon 2030

La politique industrielle devrait recenser les possibilités qui s’ouvrent pour une future croissance durable et inclusive à l’échelle mondiale, et favoriser leur réalisation. Personne ne devrait être laissé de côté.

L’Europe doit conserver son ambition de rétablir la part de la production industrielle à ses niveaux antérieurs, en affinant cet objectif au moyen d’indicateurs de performance clés. La politique industrielle de l’Europe (au niveau des directions générales de la Commission européenne, des États membres, des régions) doit être améliorée, dans la mesure où elle fait partie de chaînes de valeur transfrontières complexes, au sein d’un marché de plus en plus mondialisé. Il est nécessaire d’adopter une approche globale pour concilier la croissance, la lutte contre le changement climatique et les défis environnementaux et sociétaux dans le cadre d’une transition juste, connectant de manière efficace les moteurs économiques de l’UE et des États membres.

Lorsque l’on parle de rEUnaissance de l’Europe, cela signifie un véritable plan directeur pour l’industrie européenne, intégrant la politique industrielle dans toutes les politiques de l’UE, en permettant à l’industrie de se transformer en vue de faire de l’Europe la plus vaste économie de la connaissance, dégageant de la valeur ajoutée dans l’industrie grâce à la créativité et la conception intelligente, l’innovation sociale et la promotion de nouveaux modèles industriels durables et inclusifs (la marque fabriqué en Europe).

Si l’on souhaite que les politiques de l’UE en matière de climat et d’économie circulaire créent des emplois en Europe, il est essentiel que les principaux éléments de la chaîne de valeur qui permettent ces politiques soient situés sur notre continent. Par conséquent, il importe que la stratégie de l’Union européenne reconnaisse l’importance des chaînes de valeur et prévoie des mesures ambitieuses pour les développer davantage. Plutôt que de se concentrer sur certains secteurs, la stratégie devrait assurer des conditions de fonctionnement attrayantes en Europe. Pour garantir que l’Europe continue de jouer son rôle dans l’économie mondiale, la réussite devrait être mesurée à l’aune du potentiel des différents maillons de la chaîne de valeur européenne à être intégrés dans les chaînes de valeur mondiales – autrement dit, les fournisseurs européens devraient être à même d’affronter la concurrence mondiale, et pas seulement européenne.

Il convient par ailleurs de relier étroitement les améliorations qui sont apportées dans le domaine de l’éducation et de la formation en vue des nouveaux emplois et services aux politiques de R&D&I et à la création de formations par le travail, en étendant la stratégie relative aux compétences à des secteurs industriels majeurs, tels que ceux de la construction, de la sidérurgie, du papier, des technologies vertes et des énergies renouvelables, ainsi que l’industrie manufacturière et le transport maritime.

Pour assurer la suprématie technologique de l’Europe, le CESE recommande également d’intensifier les investissements dans les technologies de rupture qui changent la donne, telles que l’intelligence artificielle et la robotique, l’internet des objets, l’analyse des données, l’impression en 3D, les matériaux nouveaux et les nanomatériaux, la réalité virtuelle augmentée, la bioéconomie, l’alimentation durable, les technologies numériques, les neurotechnologies, la nanoélectronique, l’exploration océanique et spatiale, etc.

Il y a lieu que le cadre financier pluriannuel 2021-2027 prévoie de la manière la plus ciblée et la plus détaillée possible des ressources budgétaires supplémentaires à allouer à chaque secteur, en particulier la R&D&I et les politiques de cohésion.

Le CESE souligne qu’il convient de renforcer la gouvernance institutionnelle, en incluant dans ses évaluations d’impact non seulement l’impact économique, mais également l’impact sur l’environnement et la société tout au long de la chaîne de valeur.

Dans la perspective d’une chaîne de valeur financière plus durable dans son ensemble, le CESE soutient résolument la feuille de route de la Commission sur le financement d’une croissance durable, qui passe par l’instauration d’une taxinomie commune de la finance durable, réorientant l’épargne responsable vers des investissements durables, en améliorant les investissements stratégiques européens (combinaison équilibrée entre le Fonds InvestEU prévu et les sources de financement privées).

Le CESE réaffirme qu’il soutient fermement la règle d’or pour l’investissement public, non seulement pour le cofinancement de projets d’investissement stratégiques, mais également pour tous les projets d’investissement durable s’inscrivant dans l’évolution positive du système de classification de l’Union européenne pour les activités durables (taxinomie), afin d’offrir de nouvelles possibilités de développement aux pays européens qui ont été les plus pénalisés par la crise.

Instruments de financement: création de conditions de concurrence équitables, octroi de financements publics en faveur des projets à l’échelle industrielle (jusqu’à 75 % du coût de l’investissement, ou plus si cela se justifie), augmentation des prêts préférentiels et de l’accès au crédit. Accès à des subventions publiques pour les actions axées sur la réduction du risque pour les projets novateurs à haut risque intrinsèque.

Les secteurs les plus productifs (avec la plus haute valeur ajoutée) sont également ceux dans lesquels l’innovation est la plus élevée. En outre, les secteurs qui sont soumis à une réglementation environnementale plus stricte se caractérisent également par un nombre supérieur de dépôt de brevets, sans doute en raison des pressions exercées par les pouvoirs publics.

Un des principaux facteurs des coûts de réglementation est la mise en œuvre des politiques de l’UE par l’intermédiaire des actes délégués ou des actes d’exécution. Les procédures de mise en conformité, qui sont technocratiques et ne définissent pas les moyens les plus rentables d’atteindre les résultats réglementaires souhaités, ralentissent la capacité d’innovation des acteurs de l’industrie, en particulier les PME.

Le développement durable et la compétitivité doivent aller de pair. Le CESE demande l’établissement de normes pour les produits dans l’Union, qui devraient être respectées tant par les producteurs des États membres que par les producteurs étrangers, et être exécutoires à la frontière. Les importations de produits qui ne respectent pas les règles environnementales et sociales ont pour résultat que les secteurs industriels de l’UE sont confrontés à de graves obstacles pour répondre aux besoins et aux demandes de la société en matière de développement durable.

La Commission européenne devrait surveiller de près la bonne mise en œuvre des accords de libre-échange (ALE) conclus par l’UE, en prévoyant des règles simples et précises. Les chapitres consacrés au développement durable dans les accords de libre-échange doivent promouvoir la mise en œuvre des normes de travail de l’OIT et des principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, en établissant des conditions minimales transversales qui ne peuvent pas être contournées (droits des personnes vulnérables, bonne gouvernance budgétaire, etc.). Il convient de garantir la réciprocité dans les relations commerciales (par exemple, investissements, marchés publics, subventions).

Il est nécessaire de prévoir un dialogue social étendu à différents niveaux afin d’analyser correctement les chaînes de valeur mondiales et de fournir des réponses communes, au sein d’entreprises durables dans lesquelles les travailleurs ont voix au chapitre.

Le CESE demande à la Commission européenne de faire de la compétitivité et de la primauté industrielles une priorité politique essentielle et de lancer un programme européen de stratégie industrielle. Il demande instamment à la Commission de publier un rapport annuel sur les résultats de la stratégie industrielle de l’UE portant sur tous les domaines pertinents de l’action de la Commission.