Les populations locales sont les principaux moteurs du développement rural

Vision et leadership, telles sont les principales conditions du développement rural. Des dispositifs d’aide publique ciblés et aisément gérables en garantiront le succès. C’est là le principal enseignement de l’audition sur le thème «Les villages et les petites villes en tant que catalyseurs de développement rural: défis et opportunités», organisée par le Comité économique et social européen (CESE) le 14 février, à Bruxelles.

Pour le Comité économique et social européen, la revitalisation des zones rurales est l’un des principaux projets que l’Europe doit réaliser grâce à un effort commun. Les principales conclusions de cette audition seront intégrées à l’avis d’initiative du CESE en cours d’élaboration sur cette question. «Les campagnes appartiennent à l’ensemble des citoyens. C’est la raison pour laquelle l’engagement de tous est nécessaire. Nous voulons développer les concepts adéquats avec les citoyens sur le terrain et accroître la visibilité des villages et des petites villes», a déclaré M. Tom Jones, rapporteur de cet avis, au début de la réunion. Mme Piroska Kállay, présidente du groupe d’étude du CESE sur ce thème, a quant à elle ajouté: «Les villages sont des pôles sociaux, au sein desquels les valeurs et les compétences sociales sont enseignées et la société fait la preuve de sa cohésion».

Les défis à relever sont considérables: les zones rurales connaissent un déclin depuis les 30 ou 40 dernières années. Les conséquences sont graves: infrastructures insuffisantes et ne permettant pas de satisfaire aux besoins de base tels que magasins d’alimentation, écoles, infrastructures médicales, etc., peu de possibilités d’emploi, systèmes de transport public insuffisamment développés avec pour conséquence une forte dépendance vis-à-vis de la voiture, population vieillissante, etc.

Cependant, des personnes orientées vers l’innovation peuvent apporter des solutions à quasiment tous ces problèmes: l’audition du CESE a débuté par la présentation de deux exemples de «bonnes pratiques», l’un en provenance du Pays de Galles, au Royaume-Uni, et l’autre de Hongrie.

L’approche ascendante — un effort concerté

Le village de Tre’r Ddol, au Pays de Galles, était confronté aux mêmes problèmes que bien d’autres villages en Europe: les usines ferment ou se délocalisent, les entreprises cessent leurs activités, les agriculteurs renoncent aux leurs, les commerces ne sont plus du tout rentables, les jeunes partent et même les églises sont abandonnées. Mais la communauté de Tre’r Ddol a refusé d’accepter son déclin et des bénévoles ont entamé la redynamisation de l’ancienne entreprise «Clettwr Services» en y inaugurant un café et une boutique. L’entreprise a désormais créé 9 emplois à temps partiel et 50 bénévoles se chargent d’assurer l’entretien ainsi que d’autres services. L’entreprise engrange d’ores et déjà des bénéfices qu’elle réinvestit dans l’offre de services supplémentaires ainsi que dans un nouveau bâtiment. «Mais bien plus que l’aspect financier, ce qui importe, c’est l’impact social sur le village et ses habitants, un impact qui se fait sentir à bien des égards: les jeunes sont en mesure de gagner de l’argent pour la première fois, ils apprennent la discipline et acquièrent leur première expérience professionnelle, les personnes âgées et les personnes seules ont un endroit où se réunir, des emplois locaux sont créés pour la population locale, l’argent reste et circule sur place et enfin, et ce n’est pas l’un des moindres résultats, la culture locale revit un peu, ce qui se manifeste notamment par un regain de la pratique du gallois», a expliqué M. Callaghan, l’un des créateurs de ce centre de service local.

L’approche ascendante — le fruit d’une vision

Les «ingrédients» du développement du village hongrois de Kozárd, situé dans l’une des dix provinces les plus pauvres d’Europe, sont une maire dynamique, dont le dessein est de prendre soin de ses administrés, d’améliorer leurs vies et de stimuler les entreprises, mais aussi des citoyens engagés, désireux d’investir dans leur région, et, enfin, éléments d’importance, une coopération avec les autorités régionales, provinciales et nationales, ainsi que les fonds mis à disposition notamment par l’UE dans ce domaine. Le village de Kozárd a choisi de revitaliser ses traditions de manière durable. Il a misé sur un nouveau développement de son agriculture locale – principalement des vergers et des productions végétales, tout en assurant la transformation des produits locaux et en adaptant le village au tourisme rural. Les concepts adoptés comprennent la redynamisation des coutumes locales, ainsi que la relance et la promotion de manifestations locales. La maire accomplit actuellement son quatrième mandat et Kozárd a entre-temps accueilli un département de l’Université de Debrecen qui y organise des congrès. Le village a également été récompensé par différents prix. Il prévoit de mettre 13 autres projets en œuvre, avec des villages voisins, et a créé des emplois non seulement à l’intention de ses habitants mais aussi pour des travailleurs venant de villages alentours. Pour M. Hajas, l’époux de la maire, il importe de commencer par éduquer. «Il est important d’apprendre aux enfants ce que cela signifie de vivre dans une zone rurale et de les sensibiliser à la nature.»

L’approche descendante — encourager et former les citoyens

L’approche ascendante telle qu’elle est présentée dans les deux premiers exemples ne fonctionne pas partout. Des incitations sont parfois nécessaires pour pouvoir lancer un projet. Et c’est là que des organisations telles qu’ECOVAST interviennent. ECOVAST organise des ateliers auxquels participe la population rurale, en vue de développer des concepts de revitalisation des villages, mais aussi de protéger les paysages, de préserver le patrimoine et de sauvegarder ou redynamiser les coutumes locales. On trouve des exemples de réussite partout en Europe. Mme Fabijanić, d’ECOVAST Croatie, a mentionné à cet égard les exemples de villes allemandes et autrichiennes situées le long de l’ancien rideau de fer, ainsi que de villes croates. Elle a souligné le fait que les défis dans l’ancienne «Europe de l’Est» étaient différents de ceux que l’on rencontre en Europe de l’Ouest, et que les programmes de financement devraient tenir compte de cette différence.

L’approche descendante — la création de partenariats

«Les villages ont besoin de partenaires». Telle est l’approche de la politique de développement rural autrichienne, et l’Autriche, contrairement à d’autres pays, oriente une bonne partie des investissements vers le 2e pilier. M. Fankhauser, de la Chambre d’agriculture autrichienne, a mis en avant l’importance de se concentrer sur le développement rural, l’une des raisons pour lesquelles, en Autriche, 20 % de l’agriculture est d’ores et déjà biologique et près de 70 000 emplois ont été créés en milieu rural. L’Autriche accorde une attention toute particulière au fait que son agriculture soit globale et compétitive. Cette politique est également la raison pour laquelle, en Autriche, les villages ont connu une plus forte croissance que les villes. Les défis rencontrés sont les mêmes que dans d’autres régions rurales d’Europe:

  • la numérisation,
  • l’amélioration des infrastructures, et
  • l’augmentation de la valeur ajoutée régionale et locale, par exemple grâce à des concepts de marketing direct.

La PAC doit jouer un rôle décisif en faveur d’un développement rural durable

M. Scheele, de la DG AGRI, a souligné que le développement rural ne concernait pas la seule agriculture. Quoi qu’il en soit, 77 % des fonds alloués le sont à des paiements directs, tandis que 23 % sont investis dans le développement rural. «C’est là la volonté des États membres», a affirmé M. Scheele. Le débat en cours sur la politique agricole commune (PAC) est également marqué par des critiques à l’égard de la répartition des paiements directs. Il est également nécessaire d’accroître la résilience des exploitations agricoles, d’améliorer les conditions pour les jeunes agriculteurs, d’agir dans le domaine du climat, et de créer des partenariats en matière d’agriculture et de développement (Cork).

Citant le président Juncker, M. Scheele a déclaré que la CAP devait offrir un filet de sécurité de base aux agriculteurs. Elle doit répondre aux défis auxquels la société est confrontée, qu’il s’agisse de sécurité alimentaire, de protection de l’environnement ou de changement climatique. Et elle doit contribuer de manière significative à la réalisation des priorités de la Commission telles que l’accord de Paris sur le climat et les objectifs de développement durable.

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