Recommendations

Deux ans après le début de la pandémie de COVID-19, au cours de laquelle la société civile organisée a joué un rôle clé pour faire face aux innombrables difficultés rencontrées à tous les niveaux, quelque 400 citoyens d’Europe ont assisté à l'édition 2022 de la conférence des Journées de la société civile afin de relever, avec les organisations et institutions européennes, les défis d’une prospérité durable pour l’Europe et de proposer des solutions opportunes au regard de la situation politique critique à laquelle Union européenne se trouve confrontée. C’est dans ce contexte que les recommandations suivantes, visant à assurer une prospérité durable en Europe, ont été formulées dans le cadre de sept ateliers thématiques différents:

Des possibilités de renforcement des compétences pour tous

  • Les ingénieurs ont la capacité de transformer un monde empreint de défis liés à la durabilité. L’acquisition de compétences est nécessaire pour permettre aux ingénieurs de relever ces défis de manière efficace. Nous devons former les ingénieurs actifs au plus vite. Le «GreenComp» (le cadre de compétences en matière de durabilité) est le phare qui guide le processus de renforcement et de reconversion des ingénieurs par l’intermédiaire d’un perfectionnement professionnel continu approprié (avec la Fédération européenne d’associations nationales d’ingénieurs, FEANI).
  • En tant que prestataires de formations, nous recommandons de se concentrer davantage sur la reconnaissance des compétences et des capacités des ressortissants de pays tiers et d’enrichir nos sociétés en faisant preuve d’une meilleure utilisation de leur potentiel (avec l’Association européenne pour la formation professionnelle, AEFP).
  • Les citoyens devraient pleinement jouir de leurs droits à l’éducation dans la révolution des compétences, garantissant ainsi un accès universel, adapté cela dit, à l’apprentissage tout au long de la vie pour tous. Il s’agit notamment d’utiliser des canaux préférentiels, tels que les organisations de la société civile et les prestataires de services éducatifs, dans l’objectif d’atteindre les personnes qui en ont le plus besoin et de soutenir une Europe à la prospérité partagée (Lifelong Learning Platform, LLLPlatform).

Dialogue intergénérationnel entre les entrepreneurs de l’Union européenne

  • La tenue d’un dialogue et d’une collaboration qui soient intergénérationnels, internationaux, interculturels, multidisciplinaires et transsectoriels en vue de co-créer un meilleur avenir pour l’Union européenne et le reste du monde revêt une importance cruciale. Les réseaux, plateformes, liens et échanges entre des personnes et des groupes, intégrant tous les segments de la population et adhérant pleinement à une plus grande diversité d’origines et de croyances au sein de nos organisations, apportent une valeur ajoutée extraordinaire. Une collaboration efficace et mutuellement bénéfique entre les secteurs public, privé et social, tirant parti des ressources et des capacités de tous les secteurs, donnant aux citoyens les moyens de faire partie de la solution à nos défis communs avec les bonnes incitations et conciliant les intérêts est d’une importance vitale.
  • Nous nous sommes accordés sur les possibilités et la responsabilité partagée de tous les acteurs afin d’accélérer la transition vers une économie entièrement circulaire, avec l’aide d’organisations motivées et responsables sur le plan environnemental qui ont de bons résultats tout en respectant une bonne éthique, et en intégrant les effets et la croissance axés sur le développement durable sous l’égide des objectifs de développement durable (ODD) de l’Organisation des Nations unies. Nous devons redéfinir notre manière de mesurer les progrès accomplis, notamment les indicateurs de performance clé qui ne se contentent pas de suivre l’évolution du PIB mais prennent en considération les effets de l’activité humaine sur l’environnement et la biodiversité, le bien-être physique et mental, l’accès à l’éducation, la résilience ou encore les droits humains. Une conception globale composée d’écosystèmes en constante évolution et de plus en plus complexes est le seul objectif qui nous permettra d’orienter de manière proactive les inévitables transformations systémiques et les bouleversements technologiques, politiques, et sociétaux dans la bonne direction afin de nous aider à faire face aux crises convergentes actuelles et futures en matière de santé, de climat, de sécurité, d’approvisionnement et d’économie. Nous devons chercher à comprendre en profondeur l’état actuel du monde et de l’environnement, la vitesse des changements, l’intégration des nouvelles technologies, les nouvelles tendances, les risques, les enjeux et les possibilités, et à optimiser l’allocation et l’effet de levier des ressources humaines, financières et techniques disponibles en vue de développer au maximum les effets positifs. Les secteurs public et privé doivent agir de manière décisive pour s’assurer d’apporter à chacun la prospérité, en améliorant et en élargissant l’accès aux soins de santé, à l’éducation et aux possibilités de développement économique, tout en faisant tout le nécessaire pour améliorer l’état de la planète, sans laisser personne de côté.
  • Les citoyens et la planète doivent se trouver au cœur de toutes nos décisions. Les entreprises et les gouvernements doivent placer l’humain au cœur du processus, en donnant à chacun les moyens d’agir et en encourageant les citoyens à faire partie de la solution à nos problèmes communs. Pour prospérer dans le nouveau monde, nous devons renforcer l’engagement des citoyens et des employés et mettre en place des programmes ambitieux en matière de perfectionnement des compétences, de santé mentale, de développement de carrière, de mise en réseau et d’effets sociaux collaboratifs, afin d’améliorer la vie des personnes et d’obtenir de meilleurs résultats, d’améliorer nos organisations, de renforcer nos valeurs, de consolider nos sociétés et, en fin de compte, de rendre le monde meilleur d’une manière qui se veut pratique, évolutive et mesurable.

Des volontaires pour la prospérité

  • La Commission européenne devrait prendre des mesures pour faire de 2025 l’Année européenne des bénévoles. Cette décision permettrait de rendre hommage aux millions de bénévoles qui ont démontré l’importance de leur rôle social, en particulier ces derniers mois, et de donner à l’Union l’inspiration nécessaire pour étendre et créer de nouveaux programmes s’adressant aux bénévoles de tous âges, y compris dans le cadre du bénévolat familial et des programmes de mentorat intergénérationnel. Le bénévolat est une composante essentielle de la démocratie européenne et une expression des valeurs européennes. La participation active des citoyens est indispensable, tant dans des actions pratiques que dans l’élaboration de politiques conduisant à des changements systémiques.
  • La contribution des bénévoles devrait être considérée comme un élément clé de l’«effort d’équipe» transsectoriel, et comme un partenaire de confiance pour la cohésion sociale et la prospérité partagée. Le bénévolat crée d’incroyables réseaux humains, toutefois il doit être perçu comme un élément complémentaire et ne jamais remplacer la responsabilité de la fourniture de services par les autorités publiques. Comme mis en lumière lors du concours «Capitale européenne du bénévolat», une bonne collaboration transsectorielle à l’échelon local pour les communautés de toutes tailles et de toutes situations a, en tant que moteur de création de valeur, un fort potentiel, conduisant à une prospérité partagée qui est essentielle pour le développement durable, ainsi que pour la préparation aux catastrophes et la réduction des risques. Le bénévolat constitue un élément important de la résilience des communautés. Il est essentiel que le bénévolat fasse partie intégrante des plans communautaires en matière de prévention et de réponse aux crises. Le bénévolat en temps de crise nécessite une attention, une planification et une organisation particulières.
  • Nous devons élaborer une politique relative au bénévolat à l’échelle de l’Union. Il existe à ce jour une politique relative au bénévolat, toutefois elle concerne principalement les jeunes au lieu de s’adresser à toutes les générations. Le bénévolat n’est pas gratuit. Nous avons besoin d’une prise de position beaucoup plus proactive concernant ses répercussions importantes sur la prospérité partagée de la société par les décideurs politiques à tous les niveaux, en allant du niveau local au niveau européen. Un financement public transparent et démocratiquement distribué aux initiatives de bénévolat démocratiques et inclusives, accompagné de procédures claires et transparentes, est essentiel pour un bénévolat de qualité qui apporte une réponse aux défis à long terme en matière de cohésion sociale, de sûreté, de sécurité et de prospérité pour tous.

Un environnement favorable à la société civile: plaidoyer pour une participation constructive

  • Nous nous tenons aux côtés de ceux qui souffrent de la guerre en Ukraine et, en tant que société civile européenne, y compris le domaine caritatif, nous voulons aider à répondre aux besoins dans ces circonstances, ainsi que dans le cadre de la construction d’une économie et d’un avenir durables au service des personnes et de la planète.
  • La société civile, y compris le milieu caritatif, est mise au défi tant au niveau mondial qu’européen, et nous saluons les efforts déployés à l’échelle européenne, par exemple dans le plan d’action en faveur de l’économie sociale et dans les propositions présentées au niveau du Parlement européen (propositions des commissions LIBE et JURI).
  • En outre, nous recommandons aux décideurs politiques de l’Union européenne d’établir des stratégies cohérentes (internes et externes) de la société civile de l’Union, y compris des politiques fondées sur:
    • une meilleure reconnaissance du secteur et du dialogue civil;
    • des cadres juridiques ouverts et la création de conditions de concurrence équitables;
    • l’accès aux financements publics et la suppression des obstacles aux organisations caritatives transfrontalières;
    • des mécanismes de suivi et de protection à l’échelle de l’Union, au cas où les lois et politiques nationales seraient en conflit avec le droit de l’Union ou les droits fondamentaux.

L’édification d’une économie démocratique pour une transition juste

  • Une transition juste n’est possible que par la profonde transformation de nos économies et par leur réorientation vers des objectifs sociaux et environnementaux. Pour atteindre cet objectif, les institutions de l’Union doivent garantir une participation constructive des parties prenantes aux décisions concernant le Semestre européen, le pacte vert pour l’Europe, la réforme du cadre budgétaire de l’Union, le plan d’action en faveur de l’économie sociale et d’autres processus, en commençant par un dialogue social et civil qui se montre efficace et en utilisant diverses formes de participation des citoyens et de démocratie participative.
  • Les syndicats, les acteurs de l’économie sociale, les mouvements sociaux et les organisations de protection du climat et de l’environnement ont mis en place d’importantes initiatives pour faire face aux crises climatiques et sociales actuelles. Nous avons besoin d’une stratégie à l’échelle de l’Union européenne qui soutienne et élargisse les solutions existantes, telles que les communautés énergétiques, les larges alliances pour une transition juste et les solutions relatives à l’économie sociale. Dans le cas spécifique des solutions relatives à l’économie sociale, favorisées par les coopératives, les mutuelles, les associations, les fondations et les entreprises sociales, le plan d’action en faveur de l’économie sociale et les initiatives qui en découlent offrent la possibilité d’une amélioration. Si l’économie sociale constitue aujourd’hui 6,3 % du total des emplois au sein de l’Union, elle a le potentiel de représenter 10 % de tous les emplois de l’Union d’ici à 2030. La croissance n’est pas une fin en soi, mais il convient de reproduire des innovations sociales et environnementales, de responsabiliser les citoyens et de créer une prospérité et un bien-être partagés pour les communautés locales.
  • Pour atteindre la neutralité climatique et veiller à ce que personne ne soit laissé de côté, nous devons créer des alliances entre diverses parties prenantes et entre les secteurs. Nous appelons tous les acteurs de la transition à se rassembler en coalitions, à échanger et à coopérer afin d’assurer une transformation plus démocratique de nos économies. Engageons-nous à stimuler une transformation ascendante et historique de nos économies et de nos sociétés, une transformation ayant pour objectif la neutralité climatique, mais aussi une amélioration en matière de bien-être, d’inclusion et de cohésion, et la construction d’une économie au service des personnes et de la planète.

Une économie de marché sociale et écologique pour l’avenir de l’Europe

  • L’Europe et le monde vivent à nouveau une période de turbulences. Une nouvelle fois, une guerre insensée touche le cœur de l’Europe; une agression que nous déplorons, tout en appelant à un cessez-le-feu rapide et à la paix en Ukraine. Nos décisions collectives au cours de cette période difficile que nous traversons actuellement auront des répercussions déterminantes sur notre avenir. En ces temps sombres, nous devons souligner la réponse positive de la société civile européenne, y compris le milieu caritatif, qui fait preuve de solidarité avec le peuple ukrainien.
  • L’économie de marché sociale est une composante essentielle de notre identité, de ce que nous sommes en tant qu’Européens, et de notre projet européen en tant que catalyseur des progrès économiques et sociaux. Aujourd’hui, nous devons renforcer notre économie de marché sociale, tout en continuant à jouer un rôle de premier plan dans la transition écologique afin d’atteindre l’objectif de l’Union consistant à créer une économie au service des personnes et de la planète. Nous appelons donc à un renforcement du marché social et écologique pour un avenir de prospérité partagée. Notre action en tant qu’Européens doit être globale et ambitieuse, en assurant la convergence des initiatives politiques clés de l’Union et du plan d’action sur le socle européen des droits sociaux, du pacte vert, de l’instrument de l’Union européenne pour la relance ou du plan d’action en faveur de l’économie sociale, entre autres, et en veillant à ce que les citoyens de l’Union puissent être maîtres de leur destin en participant activement à la mise en œuvre de ces initiatives emblématiques. Dans le même temps, l’Union européenne doit être dotée de ressources et de compétences suffisantes pour traiter les questions environnementales et sociales, dans le respect du principe de subsidiarité. Cet aspect pourrait nécessiter une modification du traité afin d’accorder à l’Union des compétences fiscales et des capacités de dépense autonomes.
  • L’économie sociale est un acteur essentiel du renforcement de l’économie de marché sociale et écologique de l’Europe, avec 2,8 millions d’entreprises et d’organisations d’économie sociale, telles que des coopératives, des mutuelles, des associations, des fondations et des entreprises sociales, qui mettent leurs activités au service des personnes, et qui apportent des solutions collectives aux défis collectifs, tels que la création d’emplois de qualité pour tous (y compris pour les plus vulnérables), la fourniture de services sociaux universels, la transition énergétique, la lutte contre les inégalités, etc. L’action en faveur de l’économie sociale devrait être un pilier important de la stratégie européenne visant à renforcer une économie de marché sociale et écologique. À ce jour, l’économie sociale représente 6,3 % de la totalité des emplois au sein de l’Union. Avec un soutien adéquat, elle devrait représenter au moins 10 % de la totalité des emplois d’ici à 2030.

L’avenir de la protection sociale et l’État-providence européen: les régimes de revenu minimum et l’accès à des services sociaux de qualité

  • Les organisations de la société civile, les prestataires de services sociaux et les personnes touchées par les politiques doivent prendre part à toutes les étapes de l’élaboration des politiques et à toutes les discussions concernant les futures réformes des États-providence et des systèmes de protection sociale: nous connaissons les histoires, les expériences vécues et les besoins des personnes et nous donnons une voix à ceux qui sont traditionnellement sous-représentés lors de la prise de décision.
  • Des efforts supplémentaires doivent être fournis pour garantir à chacun une vie décente: les personnes ayant un emploi doivent gagner un salaire décent et bénéficier de conditions de travail équitables. Les personnes en dehors du marché du travail doivent pouvoir compter sur des systèmes de revenu minimum qui (1) leur permettent de vivre une vie sans pauvreté ni exclusion, (2) sont accessibles à tous et (3) permettent et renforcent la participation des personnes à la société. La législation de l’Union européenne devrait également soutenir le droit à un salaire et à un revenu minimum.
  • Les services sociaux doivent être abordables et accessibles à tous. Pour qu’ils se renforcent mutuellement, les services sociaux et les régimes de protection sociale doivent (1) être financés de manière adéquate par des sources collectives de revenus, (2) garantir et promouvoir une approche fondée sur les droits, (3) être centrés sur les besoins des personnes, (4) favoriser la responsabilisation, l’autonomie et l’indépendance des utilisateurs, (5) favoriser l’intégration des services
  • et (6) suivre une approche d’inclusion active. Il est aussi absolument nécessaire d’améliorer la reconnaissance des personnes travaillant dans les services et la résilience des prestataires de services sociaux.