European Economic
and Social Committee
Le CESE salue le Prix Nobel à Richard Thaler: le nudging est un outil qui peut aussi être utile dans les politiques UE
La semaine dernière, l’universitaire américain Richard Thaler a reçu le prix Nobel d’économie pour ses travaux d’avant-garde dans le domaine de l’économie comportementale. M. Thaler est particulièrement connu pour ses recherches sur la théorie du nudge («coup de pouce»). Il a inventé ce terme pour expliquer la manière dont certaines mesures peuvent encourager des individus à prendre certaines décisions.
Un an avant l’attribution du prix Nobel à M. Thaler, le Comité économique et social européen (CESE) avait plaidé en faveur du nudge, y voyant un outil précieux pour surmonter des défis particuliers en matière sociale, environnementale et économique.
Dans un avis d’initiative sur ce thème, le CESE avait proposé de faire du nudge un cinquième outil pour les pouvoirs publics, en plus de l’information et de la sensibilisation, de l’incitation financière, de la législation (interdiction ou obligation) et de l’exemplarité.
«Les nudges présentent deux avantages majeurs: ils ne restreignent pas les libertés individuelles et ont un coût limité, alors que leur impact peut être significatif», a déclaré Thierry Libaert, rapporteur de l’avis du CESE. «Ils peuvent donc constituer un outil complémentaire, s’inscrivant dans le cadre de politiques publiques visant à rendre les comportements individuels plus responsables pour la santé, l’environnement, etc.»
Un exemple bien connu de nudge mis en place en Europe est celui des fausses mouches peintes à l’intérieur des urinoirs de l’aéroport d’Amsterdam afin d’inciter les hommes à bien viser; un autre est celui de l’escalier musical de la station Odenplan du métro de Stockholm, dont l’objectif est d’inciter les usagers à utiliser les escaliers plutôt que les escalators.
Toutefois, le nudge présente des limites. Il exige une grande rigueur de conception et de mise en place, et pose des questions à la fois techniques et éthiques. Il ne se substitue pas à l’impératif d’information des citoyens et aux démarches pédagogiques visant à éclairer leur choix, ni aux moyens d’action classiques des pouvoirs publics que sont la loi et les leviers d’incitations économiques.
De plus, la frontière est parfois difficile à définir entre information, communication et manipulation. Les nudges peuvent tendre vers la manipulation, au détriment des personnes.
Le CESE propose donc d’assurer une déontologie du nudge afin d’éviter de le dévoyer vers des objectifs non responsables. Dans son avis, M. Libaert avait mentionné quatre conditions qui doivent être respectées lors de la mise en place d’un nudge:
- le processus doit être transparent;
- les personnes concernées doivent toujours avoir le choix d’agir dans un sens ou dans l’autre;
- elles doivent obtenir des informations fiables;
- elles ne doivent pas être culpabilisées.
«Nous nous réjouissons que, grâce à ce prix Nobel, le nudge devienne un sujet de discussion. Dans le respect de la déontologie proposée, les nudges pourraient être intégrés dans le cadre de politiques publiques globales et accélérer leur mise en œuvre à moindre coût», a déclaré M. Libaert.
Photo : © Nobel Media AB 2017 / Alexander Mahmoud