Le débat sur une stratégie à long terme en faveur d’une Europe plus durable a été lancé par le CESE avec une audition publique qui a eu lieu le 1er mars dernier. Sur la base d’une évaluation des tendances et des défis à long terme, tels que la numérisation de l’économie, le passage à une économie à faible émission de carbone et la transformation des marchés du travail, l’audition a examiné l'évolution vers un nouveau modèle économique qui soit économiquement plus résilient, socialement plus équitable et plus responsable du point de vue de l’environnement.
La manifestation intitulée «Vers une Europe plus durable» a donné la parole aux intervenants suivants: Karl Falkenberg, ancien directeur général de la DG ENV (Commission européenne), Marina Larkin, du Forum économique mondial, Karl Aiginger, de l’Institut autrichien de recherche économique (WIFO), ainsi qu’un certain nombre d’experts de l’École supérieure de commerce ESCP, du groupe de réflexion Confrontations Europe et du Service d’action des citoyens européens (ECAS). Le débat entre les experts des organisations de la société civile européenne et les membres du CESE a été présidé par Hans Joachim Wilms, ancien vice-président du CESE.
Martina Larkin a dépeint la quatrième révolution industrielle comme une nouvelle ère de convergence des technologies, numériques et autres, qui aura un impact systémique non linéaire sur tous les domaines de la société et de l’économie. Pour maîtriser cette évolution, elle estime qu’il conviendrait de:
- se concentrer sur les systèmes et non sur les technologies;
- donner à la société les moyens de maîtriser les technologies. Celle-ci ne doit pas ressentir le changement comme une menace, mais chercher à bénéficier des avantages qu’il apporte;
- forger l’avenir plutôt que d’assister sans rien faire à son avènement: la coopération entre tous les acteurs concernés est la clé;
- considérer les valeurs comme un atout et non comme un problème.
L’emploi constituera l’un des principaux défis. Le monde professionnel dans lequel nous évoluons devra faire face à des changements considérables – telle était la position de Carole Ulmer de Confrontations Europe. Selon l’OCDE, 9 % des emplois actuels vont disparaître en raison de l’automatisation et 25 % d’entre eux (à hauteur de 50 % selon d’autres sources) connaîtront des transformations très importantes. Outre les métiers manuels, des emplois qualifiés et exigeants sur le plan intellectuel seront également menacés. Ce phénomène pose de multiples problèmes aux systèmes européens d’éducation et de formation professionnelle, sachant que l’entrée dans l’ère du numérique rend de nouvelles compétences nécessaires. L’approche de «la formation et de l’apprentissage tout au long de la vie» doit être institutionnalisée pour aider les personnes à s’adapter aux nouvelles exigences.
L’importance d’une vision à long terme pour l’Europe à l’horizon 2050 a été soulignée par Thierry Libaert, membre français du CESE. Celui-ci a déclaré que cette vision pourrait donner un cap à la transition et coordonner l’ensemble des services et des disciplines. «Nos modèles économiques non viables doivent être changés, en plaçant le bonheur des gens au premier plan», a-t-il déclaré.
Une vision fondée sur des objectifs et non sur des problèmes
Karl Aiginger, professeur au WIFO, a décrit l’Europe «comme un modèle à succès faisant sa crise de la quarantaine». Il a affirmé que l’Europe avait les yeux rivés sur les problèmes et n’avait pas conscience de ses nombreux atouts. Ce dont elle a besoin, ce sont des objectifs, assortis d’une nouvelle stratégie à long terme porteuse d’une perspective de bien-être pour tous, fondée sur la durabilité environnementale, l’inclusion sociale et le dynamisme économique.
Faire de l’Europe le chef de file en matière de développement durable
L’Europe doit s’efforcer de faire les bons choix. Se référant à la situation des États-Unis, M. Aiginger a estimé que nos partenaires d’outre-Atlantique étaient en train d’emprunter «la mauvaise route», avec des salaires bas, des conditions de dumping social, écologique et financier (le «trumping»), la fracturation hydraulique, le forage, la construction de nouveaux gazoducs et l’absence de taxes sur le carbone. Cette voie n’est pas la bonne.
L’Europe devrait prendre en considération ses points forts. L’Europe peut être un modèle de prospérité régionale d’ici à 2050:
- dynamiques renforcées reposant sur l’innovation et le capital humain;
- réduction des différences en matière de revenus, niveau d’emploi plus élevé;
- leader mondial dans le domaine des technologies environnementales, efficacité énergétique;
- préférences hétérogènes, approche politique pluraliste;
- espace ouvert, profitant de la mondialisation, accueillant pour ses voisins.
Le 21e siècle peut encore être le siècle de l’Europe, à condition que les États membres de l’Union œuvrent collectivement pour faire en sorte que leurs objectifs communs deviennent une réalité
«Nous avons déjà parcouru un long chemin en adhérant aux objectifs universels de développement durable et à l’accord de Paris sur le climat. À présent, nous devons trouver les moyens de mettre en œuvre ces avancées sans précédent», a déclaré Brenda King, la rapporteure du CESE.
«Face à la quatrième révolution industrielle, nous savons que nous n’allons pas stopper l’innovation, parce que nous en avons besoin, mais nous devons réfléchir à qu’il faut faire pour créer de la valeur qui profite à la société. Nous devons remettre les gens au centre de la politique et de l’économie. Ce qui est parfaitement clair dans ce monde en mutation rapide, c’est que nous avons besoin de plus – et non pas de moins –, de politique!».
Les résultats de cette audition seront intégrés à un avis portant sur une stratégie à long terme dans l’optique d’une Europe plus durable en cours de préparation au CESE.
Toutes les présentations de l’audition sont disponibles ici.