Les organisations européennes de la société civile doivent être des partenaires égaux sur la voie de la reprise de l’après-COVID qui mène vers un avenir durable
Depuis le début de la crise sanitaire mondiale de la COVID-19, les organisations de la société civile sont aux avant-postes, apportant un soutien aux plus vulnérables et veillant à ce que les besoins fondamentaux des populations soient satisfaits dans un contexte particulièrement difficile, parfois au péril de la santé de leurs équipes d’employés et de bénévoles. Partout en Europe, malgré le confinement et les règles de distanciation physique, des initiatives inspirantes, exigeant une solidarité et un courage considérables se sont multipliées. Sur le terrain, des millions de bénévoles ont exprimé une extraordinaire solidarité à titre individuel et intergénérationnel. Les travailleurs de première ligne ont manifesté un dévouement sans réserve pour continuer d’apporter un soutien vital à celles et ceux qui sont dans le besoin.
Durant cette pandémie, il est apparu évident que les gouvernements ne sont pas capables de résoudre seuls les problèmes innombrables auxquels les populations sont toujours confrontées: la société civile est non seulement une composante clé des systèmes démocratiques, mais elle apparaît aussi comme un acteur essentiel pour garantir la justice sociale en partenariat avec des parties prenantes d’autres secteurs. La réaction coordonnée des institutions de l’Union européenne, sans précédent, a été accueillie positivement, mais la mise en œuvre des mesures introduites reste problématique, et leurs retombées positives sont imperceptibles sur le terrain, la situation de nombreuses organisations de la société civile apparaissant de plus en plus fragile.
En notre qualité de coprésidents du Groupe de liaison du CESE avec la société civile, nous souhaitons souligner ce rôle essentiel de la société civile pour nos démocraties en Europe, tant dans la crise actuelle que dans le contexte de l’action de relance à venir – en témoignent de manière patente les expériences et idées partagées le 12 mai 2020, lors de la dernière réunion du Groupe de liaison du CESE. La pandémie n’a fait que creuser plus encore les fractures béantes qui caractérisent nos systèmes, ainsi que l’injustice et l’inégalité sociales existantes. Les organisations de la société civile sont elles-mêmes les victimes de ces inégalités et de ces faiblesses du système. Leur capacité actuelle et future à répondre aux besoins est menacée par la rareté et la nature fluctuante des ressources, laissant un vide chaque fois que les aides font défaut ou que les seules solutions apparentes sont celles qu’offrent la criminalité organisée ou les groupes extrémistes, toujours prompts à exploiter les plus vulnérables.
Les institutions européennes doivent veiller à ce que les réseaux européens de la société civile soient considérés, pendant et après la crise, comme des partenaires de confiance dans les processus politiques et la prise de décision pour faire en sorte que les citoyens, par l’intermédiaire de la société civile organisée, puissent faire valoir réellement leurs vues lors de la construction d’une Europe nouvelle, dotée d’une dimension sociale plus forte et d’un avenir plus durable.
Nous devons mettre en place des environnements propices et des possibilités de financement en faveur des réseaux européens de la société civile pour poursuivre la promotion des valeurs européennes et de la diversité, et stimuler la coopération et la solidarité dans l’Europe entière et au-delà. Cette approche aidera à repousser la tentation de la figure autoritaire de l’«homme fort» supposé capable de tenir la barre par gros temps, ou encore d’user de la peur et de l’insécurité pour réduire de manière disproportionnée l’espace civique et les libertés, avec l’effet dévastateur et durable que cela suppose.
Une authentique relance, porteuse d’une véritable transformation, nécessite de ne plus s’en tenir aux «vieilles recettes» et de faire évoluer les méthodes de travail dans le sens d’une amélioration. Cela passe par une vraie reconnaissance et une prise en compte du point de vue des réseaux européens de la société civile, lesquels doivent être associés comme des acteurs clés de la cocréation et de l’inscription dans le long terme de l’ambition d’un avenir meilleur pour l’Europe. Il nous appartient de faire éclore un avenir social et économique centré sur l’humain, changeant nos peurs en l’espérance d’une société plus durable et plus juste, où la dignité, le bien-être et le respect de chacun et de ses droits seront au cœur de chaque décision et de chaque action.
Luca Jahier, Président du CESE
Brikena Xhomaqi, Coprésidente du groupe de liaison, Directrice de la Lifelong Learning Platform (Plateforme pour l’apprentissage tout au long de la vie)