L’Union européenne ne doit pas laisser pour compte ses citoyens dépourvus de formation de base

Les 7 et 8 février, le Comité économique et social européen (CESE) et le Centre européen pour le développement de la formation professionnelle (Cedefop) ont organisé un «forum d’apprentissage des politiques» afin d’étudier les moyens de créer de nouvelles possibilités d’apprentissage et de formation pour les adultes peu qualifiés, qui représentent 25 % de la main-d’œuvre européenne et au total plus de 64 millions de personnes.                                                                                                         

Le Forum d’apprentissage des politiques (FAP) sur «Les voies de perfectionnement: une vision pour l’avenir a mis l’accent sur la recommandation du Conseil relative à des parcours de renforcement des compétences: de nouvelles perspectives pour les adultes, adoptée à la fin de l’année 2016, qui cible la population en âge de travailler ne pouvant pas bénéficier du soutien au titre de la garantie pour la jeunesse, un dispositif financé par l’UE destiné aux personnes âgées de moins de 25 ans.

L’objectif de la recommandation est de faire en sorte que tous les citoyens européens aient une chance d’acquérir l’éventail minimal d’aptitudes, de connaissances et de compétences nécessaires pour accéder au marché du travail et participer activement à la société.

Le FAP a rassemblé des représentants de gouvernements, des partenaires sociaux et de la société civile en vue de créer une plateforme pour que les États membres échangent des idées et des pratiques concernant l’élaboration et la mise en œuvre de systèmes permettant de mettre à jour les compétences des adultes éprouvant des difficultés avec la lecture et l’écriture, le calcul ou les compétences informatiques de base.

La manifestation sera suivie d’autres manifestations similaires organisées par le Cedefop afin de compléter les initiatives que déploie actuellement la Commission dans ce domaine.

64 millions de personnes sont laissées pour compte. Lors d’une crise économique, elles sont les premières à être licenciées. Au moment de la reprise économique, ces personnes seront les dernières à pouvoir réintégrer le marché du travail, a déclaré Carlos Trindade, président de l’Observatoire du marché du travail du CESE, lorsqu’il a ouvert la conférence.

Nous devons investir dans ces 64 millions de personnes, qui doivent pouvoir améliorer leur qualité de vie et leur niveau de prospérité. Nous devons veiller à ce que les progrès économiques et sociaux soient équitables. Personne ne doit être laissé pour compte, a affirmé M. Trindade.

Antonio Ranieri, chef du département «apprentissage et employabilité» du CEDEFOP, a expliqué que la dernière crise économique avait engendré une évolution structurelle du chômage. Malgré une amélioration d’ensemble du taux d’emploi, celui des personnes peu qualifiées n’a pas progressé aussi rapidement. Cette aggravation des différences entre les taux d’emploi est un phénomène nouveau, a-t-il précisé.

Le fait de ne pas posséder les compétences de base adéquates se traduit par divers effets négatifs qui affectent la santé et le bien-être des individus, ainsi que leur satisfaction à l’égard de la vie ou encore leur engagement social. Cela a également une incidence sur les employeurs ainsi que sur l’économie et la société dans leur ensemble, en freinant la productivité et la croissance et en augmentant les coûts liés à la santé, aux systèmes de protection sociale ou au maintien de l’ordre public.

La libération du potentiel des personnes peu qualifiées est source d’avantages économiques, a déclaré Lidia Salvatore du Cedefop, en ajoutant que selon une étude du Cedefop, le bénéfice économique net global qu’apporterait la réduction du nombre de personnes peu qualifiées à 7,4 % d’ici 2025 s’élèverait à 200 milliards d’euros par an.

Les parcours de renforcement des compétences qui sont proposés par le Conseil contiennent trois étapes clés, à savoir l’évaluation des compétences, des parcours d’apprentissage personnalisés et enfin, la validation et la reconnaissance. La mise en œuvre s’appuiera sur les structures qui sont déjà en place dans les États membres ou nécessitera d’en créer des nouvelles, en fonction de la situation dans les différents États membres, qui varie considérablement dans l’ensemble de l’UE.

Il appartient aux États membres de définir des priorités et d’identifier des sous-groupes au sein de la population peu qualifiée qu’ils choisiraient de cibler en premier lieu, cette population très hétérogène pouvant inclure des personnes issues de milieux défavorisés, des chômeurs de longue durée, des personnes dont les qualifications sont obsolètes, des migrants et autres. Les États membres devraient franchir les premières étapes en 2018.

La conférence a attiré l’attention sur la nécessité d’éviter que les jeunes ne deviennent peu qualifiés en les empêchant de quitter l’école prématurément. Les intervenants ont indiqué que pas moins de 60 % des personnes ayant connu un décrochage scolaire précoce sont inactives ou au chômage.

De nouveaux éléments tirés d’une étude du Cedefop suggèrent que l’enseignement et la formation professionnels (EFP) peuvent jouer un rôle positif en encourageant les jeunes à retourner à l’école ou en les maintenant dans le système éducatif, ce qui rend ce type de formation «attrayant car il offre une seconde chance».

Cependant, une récente enquête d’opinion sur l’EFP a révélé que de nombreuses personnes ne sont pas informées des possibilités de prendre part à l’EFP. 52 % des personnes qui ont suivi un enseignement général n’étaient pas informées au sujet de l’EFP; 25 % d’entre elles se l’étaient vu déconseiller et au total, 45 % de personnes peu qualifiées ont déclaré qu’elles n’en avaient pas entendu parler ou qu’elles ignoraient de quoi il s’agit.

Les participants ont convenu que pour encourager ces personnes peu qualifiées à réintégrer une formation ou le marché du travail, il est essentiel de disposer de systèmes de soutien et d’orientation adéquats, qui leur permettront de bénéficier d’une formation adaptée et appropriée. Lors de la manifestation a été évoqué l’exemple concret de l’utilisation de l’apprentissage comme méthode pour améliorer les compétences des adultes. Étant donné qu’il inclut d’importantes composantes de formation par le travail, l’apprentissage des adultes pourrait être une solution plus appropriée pour former les personnes appartenant à ce groupe.

L’accent a également été fortement mis sur la reconnaissance et la validation des compétences acquises grâce aux programmes d’apprentissage ou à d’autres moyens. À cette fin, et en particulier lorsqu’il s’agit d’adultes, il est absolument indispensable de veiller à ce que la validation des acquis non formels et informels, qui correspondent aux compétences acquises en dehors des institutions officielles, soit à la fois visible et valorisée. Les personnes peu qualifiées ont peut-être déjà acquis certaines compétences utiles, mais elles ne possèdent pas de diplôme ou de certificat qui rend ces compétences visibles.

Christa Schweng, membre du CESE, a déclaré qu’il était tout aussi important de soutenir les apprentis que les entreprises qui proposent des possibilités de mise à niveau. L’offre de formation doit prendre en compte les besoins des employeurs comme des travailleurs, a-t-elle souligné. «Des mesures de soutien doivent être mises en place des deux côtés.»

Dans l’allocution de clôture prononcée lors de la conférence, James Calleja, directeur du Cedefop, a souligné que pour mettre en place les politiques adéquates, il faut analyser minutieusement les besoins en matière de formation. Nous disposons de différents instruments: ce qui compte, c’est que nous les utilisions, a-t-il ajouté.

Pavel Trantina, président de la section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté» du CESE, a déclaré qu’il préconise la création d’une charte de qualité dans le domaine de la validation de l’apprentissage non formel et informel en vue d’instaurer la confiance dans les mesures en faveur des parcours de renforcement des compétences. Il a également souligné l’importance que revêt l’orientation dans le cadre de l’apprentissage tout au long de la vie.

En clôturant la manifestation, M. Trantina a déclaré qu’elle marque le début d’une coopération fructueuse avec le Cedefop, qui sera suivie par des rencontres consacrées à l’enseignement et la formation professionnelle/l’emploi.