Les évolutions technologiques offrent une foule de possibilités, mais comportent également des risques, ont averti les organisations de personnes handicapées lors d’une audition publique au CESE
La stratégie de l’UE en faveur des personnes handicapées pour la période 2020-2030 devrait garantir aux personnes handicapées un accès égal à un monde entièrement numérisé. Tel est l’un des messages entendus lors de la conférence sur «L’avenir de la stratégie de l’UE en faveur des personnes handicapées après 2020», qui s’est tenue ce mois-ci au Comité économique et social européen (CESE).
Pour y parvenir et répondre également à d’autres priorités, il faut que la nouvelle stratégie ait «des objectifs concrets et des échéances précises» et qu’elle prévoie la participation des personnes handicapées, a déclaré Irena Petraitiené, membre du groupe d’étude permanent du CESE sur les droits des personnes handicapées, qui a organisé l’audition.
Cette audition a réuni des représentants de diverses organisations de personnes handicapées, ainsi que de la Commission européenne et du Parlement européen. Les participants ont souligné que le nouveau cadre politique en faveur des personnes handicapées devait mettre l’accent sur l’énorme potentiel que représente la numérisation pour ces personnes.
«Il est extrêmement important que les personnes handicapées ne soient pas laissées pour compte à l’heure où la société devient entièrement numérique», a déclaré Helga Stevens, députée au Parlement européen et coprésidente de l’intergroupe «Personnes handicapées». Elle estime que d’ici 2020, 120 millions de citoyens de l’UE vivront avec une forme ou l’autre de handicap.
«L’évolution technologique offre un large éventail de possibilités pour les personnes handicapées, mais représente également un risque accru d’exclusion, si elle n’est pas gérée correctement», a averti Luk Zederloo, de l’Association européenne des prestataires de services pour personnes en situation de handicap (EASPD).
Mark Weathely, de l’Union européenne des sourds (UES), a mis tout particulièrement l’accent sur le problème de l’accessibilité de l’information en ligne pour les personnes handicapées. «Les États membres devraient améliorer l’accès aux services de médias», a-t-il déclaré, soulignant la nécessité que les sites soient «pleinement accessibles» et respectent «les normes les plus élevées et les plus exclusives».
Les intervenants ont également convenu que la nouvelle stratégie devait tenir compte de domaines clés tels que l’accessibilité, l’éducation, la mobilité, l’emploi ou la vie autonome.
«La signature par l’Union européenne de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées est une réussite qui fait de l’Union une référence mondiale dans ce domaine», a souligné Catherine Naughton, membre du Forum européen des personnes handicapées (FEPH).
En 2015, le comité des droits des personnes handicapées des Nations unies a publié ses observations finales adressées à l’Union européenne, exigeant des institutions de l’UE qu’elles remplissent leurs obligations en ce qui concerne la mise en œuvre de la convention sur le terrain.
À l’automne 2016, le CESE a publié un avis sur ces observations finales et sur une nouvelle stratégie en faveur des personnes handicapées dans l’Union. Celui-ci concluait que l’UE ne s’était pas vraiment engagée dans une réelle adaptation de ses politiques en vue de répondre aux exigences prescrites par la convention des Nations unies, et demandait aux institutions européennes d’intégrer sans délai les observations finales du comité dans le droit européen et dans ses politiques.
L’évaluation des progrès accomplis au cours des deux années qui se sont écoulées depuis la publication des observations finales adressées à l’UE par le comité des Nations unies a conduit les participants à la conclusion qu’il restait encore beaucoup de travail à faire.
«Il importe que la nouvelle stratégie couvre tous les droits abordés par la convention et qu’elle soit dotée d’un budget pour sa mise en œuvre ainsi que d’un mécanisme de suivi disposant de ressources suffisantes», a déclaré Mme Naughton.
Selon Frank Sioen, représentant du Réseau européen pour la vie autonome, la réalisation des objectifs fixés par la convention nécessite un financement approprié: «Nous devons veiller à ce que nos investissements soient axés sur l’UE que nous voulons», a-t-il déclaré.
Il est également important de ne pas oublier que les personnes handicapées sont toujours dans une situation plus désavantageuse que les autres citoyens.
Pour Martha Sticking, de l’Agence des droits fondamentaux (FRA), la stratégie devrait accorder beaucoup plus d’importance aux enfants et aux femmes handicapées, qui sont davantage susceptibles de subir des violences. «34 % des femmes handicapées ont été victimes de violence physique ou sexuelle de la part de leur partenaire, une différence importante par rapport au chiffre de 19 % parmi les femmes en général", a-t-elle indiqué.
Un autre groupe qu’il ne faut pas oublier est celui des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés. Selon les données disponibles, 20 % des migrants souffrent d’un handicap.
Shanta Rau Barriga, de Human Rights Watch (HRW), a fait état de la situation déplorable dans les centres d’accueil pour réfugiés en Grèce, où les personnes handicapées n’ont pas accès à l’eau ni à des sanitaires. «Il n’existe pas de données fiables sur le nombre de personnes confrontées à de tels besoins. Il est donc impossible d’agir», a-t-elle expliqué.