Une audition du CESE fait apparaître qu’en dépit des nombreux dispositifs de financement européens existants, les actions menées jusqu’à présent n’ont pas eu un impact significatif sur la vie des Roms.
L’effet des fonds européens en faveur de l’inclusion des Roms est souvent contrecarré parce que les projets manquent de soutien politique, que les bénéficiaires ne disposent pas des compétences et des capacités pour les mettre en œuvre ou encore parce que les besoins des communautés roms ne sont pas correctement pris en compte, telles sont les conclusions d’une table ronde organisée dernièrement par le Comité économique et social européen (CESE).
L’audition du CESE intitulée «Écueils et perspectives: mise en œuvre des projets d’intégration des Roms financés par l’UE» a permis de réunir des représentants des organisations roms, des ONG et de la Commission européenne autour de deux ateliers dont l’objectif était de formuler des conclusions et des recommandations propres à améliorer la mise en œuvre des dispositifs existants.
Les participants se sont accordés pour dire que «les lacunes dans ce domaine» sont nombreuses en raison de la lenteur des efforts consentis pour faire progresser les conditions de vie des Roms ainsi que leur intégration dans la société, et ce, en dépit des programmes de financement européens disponibles tels que les Fonds ESI ou les fonds du FSE et du FEDER.
En raison des capacités et des compétences requises pour obtenir des financements de l’Union européenne, les ONG roms se révèlent souvent très démunies pour solliciter des fonds ou les utiliser.
«Bon nombre d’ONG roms ne parviennent pas à obtenir de financements parce qu’elles ne savent pas rédiger leurs propositions», a déclaré M. Michal Miko de l’ONG tchèque Slovo21 qui plaide pour la mise en place d’un dispositif de petits projets visant à développer les compétences non techniques et les autres capacités des ONG roms de terrain.
Pour M. Dominique Be, le représentant de la Commission, le renforcement des capacités est essentiel aussi bien du côté des bénéficiaires que des pouvoirs publics, que ce soit au niveau national que local. «Dans le cas contraire, nous allons continuer à donner de l’argent à des personnes qui ne savent ni comment ni à quoi l’utiliser», a-t-il déclaré.
Mais pour que les choses avancent, c’est au niveau national qu’il convient d’agir davantage.
«Les outils sont là mais les effets que nous observons sur la vie des Roms restent limités» a déclaré Mme Belén Sánchez-Rubio du réseau EURoma. «Il nous faut des stratégies nationales qui reflètent les besoins réels des Roms dans chaque État membre. Les projets de petite envergure ont certes leur pertinence, mais il faut passer à l'échelle supérieure pour faire de cette action une politique publique qui ne soit plus seulement portée par les ONG», a-t-elle déclaré, ajoutant que les ONG devaient faire pression en faveur de réformes dans les politiques générales qui bénéficieraient aux Roms, dans des domaines tels que l’éducation ou le logement notamment.
Toutefois, rares sont les programmes pour l’inclusion des Roms au niveau national que l'on peut citer en exemple, contrairement aux programmes menés aux niveaux local ou européen qui sont eux fort nombreux.
Cet état de fait s’explique par le manque de volonté politique pour les projets en faveur de l’intégration des Roms, lequel s’explique souvent par la persistance des discriminations dont leurs communautés sont la cible dans de nombreux pays.
«Des projets parfaitement conçus ont très souvent échoué en raison d’un manque de soutien politique» a déclaré M. Deyan Kolev, président du Centre pour le dialogue et la tolérance interethniques «Amalipe», en ajoutant qu’en Bulgarie, par exemple, certains projets avaient été interrompus en raison d’un environnement public hostile à leur mise en œuvre.
«Lorsqu’une résistance de l’opinion publique apparaît, les responsables politiques préfèrent abandonner le projet», a-t-il déclaré.
Il faudrait que les responsables nationaux et locaux soient bien conscients du fait que l’aide apportée aux Roms ne dépend pas de leur bonne volonté mais qu’elle constitue une obligation.
«Nous devons adopter des mesures positives pour faire comprendre aux élus locaux et nationaux que c'est à eux qu'incombe la responsabilité de changer la donne et pas uniquement aux ONG qui travaillent dans ce domaine», a déclaré M. Gábor Daróczi, expert auprès du groupe d’étude permanent du CESE «Intégration des Roms».
Un autre enjeu est l’amélioration de la prise de conscience des droits des Roms, tant au sein des communautés roms que de la société au sens large. Elle passe par la défense des droits au niveau local, par exemple, grâce à des campagnes de promotion visant à rendre la société plus proche des Roms.
Les participants se sont entendus sur le fait que les Roms devaient prendre part à l’exécution des projets, mais qu’ils devaient aussi être conscients de la nécessité de participer de manière générale au processus décisionnel, et donc d’influencer les politiques publiques qui les concernent directement.
Les changements cependant ne se produiront pas du jour au lendemain, et il est donc d’autant plus essentiel que les projets se poursuivent au-delà de la période de financement européen destinée à permettre leur démarrage.
M. Daróczi a fait remarquer que la plupart des citoyens de l’Union n’avait aucune idée des conditions déplorables dans lesquelles vit la population rom.
«La rue goudronnée s’arrête juste à l’entrée du camp rom ... où les trottoirs n’existent pas. Quant à l’éclairage public, il n’y en a jamais eu...», a-t-il conclu.