Débat du CESE sur le thème «rEUnaissance – Une vision culturelle pour l’Europe»
Le Comité économique et social européen (CESE) a accueilli un débat sur le thème «rEUnaissance – Une vision culturelle pour l’Europe», auquel ont participé Andre Wilkens, directeur de la Fondation européenne de la culture, Pier Luigi Sacco, conseiller spécial de Tibor Navracsics, commissaire chargé de l’éducation, de la culture, de la jeunesse et du sport, Airan Berg, directeur artistique du Festival des régions, et Elke Kaschl Mohni, directrice du Goethe-Institut à Bruxelles.
Le président du CESE, Luca Jahier, a tout d’abord tenu à dire qu’il se réjouissait de voir qu’Emmanuel Macron avait souscrit à son idée d’une nouvelle renaissance pour l’Europe et que le président français partageait de toute évidence son point de vue sur la manière de raviver le projet européen. «Il faut en effet une renaissance pour l’Europe, et quoi de plus facile que d’utiliser la culture comme le vecteur et le moteur du renforcement de l’Union européenne. Nous ne devons pas oublier que notre continent était un espace culturel avant d’être un concept politique, et que l’«espace» n’implique pas l’homogénéité, mais une évolution qui s’inscrit dans la variation et le mouvement. L’Europe a besoin d’une véritable vision à long terme, qui soit audacieuse, et j’attends avec intérêt la conférence sur l’avenir de l’Europe, annoncée par Mme Ursula von der Leyen, à qui nous avons déjà apporté tout notre soutien.»
Andre Wilkens a fait référence aux textes fondateurs de la Fondation européenne de la culture, dont la mission était de créer et de promouvoir le sentiment européen. «Un sentiment d’appartenance à l’Europe serait nécessaire. Cette mission est tout autant d’actualité aujourd’hui qu’elle ne l’était alors», a-t-il déclaré. L’année 2019 et les années à venir seront décisives pour façonner l’Europe. M. Wilkens a affirmé que «nous étions confrontés à la division et à la polarisation de nos sociétés» et il a souligné que, de nos jours, la culture et l’identité sont parfois utilisées abusivement pour diviser nos communautés plutôt que pour trouver des solutions, ce qui constitue une menace pour l’intégration européenne. L’expérience de la relation interpersonnelle est essentielle. Le programme Erasmus a été un outil très efficace, qui devrait être élargi. «Nous devons imaginer l’Europe, a-t-il poursuivi, nous devons raconter l’histoire de l’Europe et en parler, et nous devons en parler non seulement en tant que modèle économique, mais aussi plus largement et d’un point de vue européen plutôt que selon une perspective nationale». Il est donc important de créer un espace public européen au sein lequel tout le monde apporterait sa contribution.
Pier Luigi Sacco a déclaré que la culture avait un impact sur notre économie, mais que si l’on regardait les États-Unis ou la Chine, l’on verrait que leur industrie culturelle s’est développée bien plus rapidement qu’en Europe.
«Nous ne devons pas sous-estimer le pouvoir de la culture pour faire la différence», a-t-il ajouté, en citant trois exemples:
- la culture rend les gens moins inquiets face à l’inconnu et à la nouveauté;
- la culture familiarise les citoyens avec les idées nouvelles et les innovations;
- la culture est un moteur de changement très puissant.
La culture pourrait ainsi influencer l’attitude des citoyens vis-à-vis de la migration, mais aussi de la protection de notre environnement. Il est important de tenir compte des défis sociétaux.
Elke Kaschl Mohni a évoqué le rôle que joue la culture dans les relations extérieures, à la faveur du glissement qui s’est opéré, de la diplomatie culturelle vers les relations culturelles. «Les relations culturelles ont pour but de renforcer la confiance et la compréhension», a-t-elle déclaré. L’accent a désormais été mis sur la qualité et l’équité, sur les échanges interpersonnels et sur des projets communs.
Elle partage l’avis de M. Sacco selon lequel la culture est un très puissant moteur de changement de comportement; toutefois, la direction que prendra cette évolution ne peut être dictée.
«Si nous optons pour l’approche des relations culturelles fondées sur la confiance, la qualité et l’équité, nous devons opérer un retour sur nous-mêmes et être transparents s’agissant de nos propres positions, de nos intérêts et de notre méthodologie, et nous garder de nous détourner des sujets difficiles», a-t-elle souligné.
La culture ne devrait pas seulement être un secteur des arts et de l’économie, mais aussi une question transversale qui touche à de nombreux aspects de notre société.
Adrian Berg a fait remarquer que la culture et l’art pourraient faire sortir les gens de leur zone de confort. «Le changement ne se produit que lorsque nous sortons de notre zone de confort», a-t-il expliqué. La culture devrait également être collaborative, participative et inclusive. Il faut passer d’une réflexion critique à la conception de l’action.
Au cours de la discussion, les membres du CESE ont établi des liens entre la culture et de nombreux sujets tels que notre patrimoine naturel, la durabilité, les droits et la dignité des minorités, la paix et les défis sociaux, ainsi que l’éducation, l’innovation, la numérisation et la place de l’intelligence artificielle dans nos sociétés et dans la vie quotidienne.
M. Jahier a conclu le débat en déclarant qu’il en avait tiré un enseignement, à savoir qu’il était possible de faire du concept de «renaissance» une stratégie pour l’Europe. À cette fin, il a cerné quatre priorités:
- ajouter la culture en tant que quatrième pilier du programme social, économique et environnemental;
- faire en sorte que la culture devienne une priorité dans l’élaboration des politiques;
- au CESE, prendre la liberté de suggérer la création d’un nouvel organe consacré à la culture;
- revenir à l’article 300 du traité de Lisbonne et insister sur la désignation de membres issus du secteur culturel.