La migration, une histoire de deux mondes

Participation du CESE au Forum mondial des médias 2016 organisé par la Deutsche Welle

Le Comité économique et social européen (CESE) a organisé pour la première fois une table ronde au Forum mondial des médias de la Deutsche Welle (DW), qui s’est tenu du 13 au 15 juin à Bonn et qui attire chaque année quelque 2 000 participants, dont 600 journalistes venus du monde entier. La table ronde sur le thème «La migration, une histoire de deux mondes» a réuni Suhrab Balkhi et Prince Wale Soniyiki, deux réfugiés originaires respectivement d’Afghanistan et du Nigéria, Mona Hemmer, une représentante de la société civile finlandaise dont le village a accueilli 100 réfugiés, ainsi qu'Alexandra Föderl-Schmid, la rédactrice en chef du journal autrichien Der Standard. La table ronde, qui a eu lieu le 15 juin, était animée par Michael Meyer, ancien correspondant de Newsweek, lauréat de divers prix, ancien directeur de la communication de Ban Ki-mon, et doyen et fondateur de l’École supérieure des médias et des communications de l’université Aga Khan de Nairobi.

 

Luca Jahier, président du groupe «Activités diverses» du CESE, a présenté les intervenants. Il a souligné l’importance de la société civile et des citoyens dans ce qu’on appelle la crise migratoire, en déclarant que «c’est la société civile qui a sauvé le visage humain de l’Europe pendant "la crise des migrants et qui a facilité l'arrivée des réfugiés dans nos communautés"». Pour le CESE, il est important, quand les peurs vont grandissant, d’aborder la question des deux points de vue: le sort des réfugiés et les possibilités dont dispose l’Europe ainsi que les exemples de meilleures pratiques. «Nous voulons contribuer à une approche plus objective envers la migration et œuvrer à des solutions durables. C’est pourquoi nous avons visité 11 pays de l’UE, ainsi que la Turquie, pour donner une voix aux réfugiés et élaboré des recommandations concrètes à l’intention des institutions de l’UE.»

«J’étais déjà dans un cercueil, avant même d’être mort», s’est souvenu Suhrab Balkhi à propos de sa fuite d’Afghanistan et de son périple vers l'Autriche via l’Inde, la Turquie, la Grèce et l’Italie. «À chaque point de contrôle, j’avais peur de mourir car les passeurs fermaient le cercueil, me laissant à peine assez d’oxygène pour respirer», a expliqué l’ancien journaliste afghan âgé de 30 ans.

«On m’a donné une banane en me traitant de singe ou on refusait de me servir au restaurant. Sur mon compte Facebook, je recevais des messages de haine m’incitant à quitter le pays. La mère de ma petite amie a menacé soit de me tuer soit de tuer sa fille si nous ne mettions pas un terme à notre relation», a raconté Prince Wale Soniyiki à propos du racisme auquel il est confronté en Croatie, où il vit depuis quatre ans et où il a fondé l’Association des Africains en Croatie, qui s’emploie à améliorer la compréhension et l’acceptation mutuelles. «Tous les Croates ne sont pas racistes. J’ai aussi eu de nombreux contacts positifs avec des personnes ouvertes, des familles d’accueil amicales et des médias tolérants», a expliqué Prince.

Les deux jeunes hommes ont dû quitter leur pays parce que leur vie était en danger.

 

Mona Hemmer, professeure retraitée et ancienne syndicaliste, représentait la société civile à cette table ronde. Nagu, son petit village en Finlande, a accueilli 100 réfugiés iraquiens et afghans en dépit des nombreuses inquiétudes avant leur arrivée. Mona a expliqué la stratégie de Nagu: «Nous n’avons pas créé de programme spécial pour nos hôtes; nous les avons simplement intégrés dans notre vie quotidienne et les nombreuses activités que nous organisons déjà tout au long de l’année. C’est le contact personnel avec les gens qui facilite le vivre-ensemble.» Maintenant, les réfugiés ont dû quitter le village malgré de vives protestations de la population de Nagu.

«Pour un journaliste, il importe d'adopter une attitude professionnelle vis-à-vis du thème de la migration. Nous devons relayer des récits comme ceux de Prince et de Suhrab, mais en tant que journalistes, nous devons également examiner les côtés «sombres» de la migration, comme les affaires de viols. La mission d’un journal de qualité est de «traduire» les témoignages et d’être un trait d’union avec les citoyens. Il est indispensable de vérifier les faits», a déclaré Alexandra Föderl-Schmid, première femme à être devenue rédactrice en chef et coéditrice du journal autrichien Der Standard.