Les employeurs européens débattent de l’avenir de l’Europe

Situation de l’économie européenne, achèvement du marché unique, commerce, Brexit: telles sont les principales problématiques aux yeux des organisations patronales européennes pour les prochains mois. Le 29 mars 2017, les directeurs et secrétaires généraux de BusinessEurope, d’EuroCommerce et du Copa-Cogeca ont présenté leurs priorités et participé à un débat avec les membres du groupe des employeurs du CESE.

«L’Europe est en meilleur état que beaucoup l’imaginent», a déclaré Markus Beyrer, directeur général de BusinessEurope. Il a formulé l’espoir que les élections à venir dans de nombreux États membres n’aboutiront pas à une représentation accrue des partis antieuropéens.

Il a souligné que le pilier social n’évolue actuellement pas dans la bonne direction et a ses limites. Selon lui, l’UE devrait se concentrer sur le pilier qui alimente le processus de réforme au niveau national, et non sur la création de nouvelles législations, en vue d’améliorer la performance des marchés du travail et des systèmes sociaux.

Selon BusinessEurope, la politique industrielle et le besoin urgent d’une stratégie pour une industrie fondée sur les points forts de l’UE sont des priorités pour les mois à venir. M. Beyrer a signalé que son association apportera un soutien permanent aux accords de libre-échange. Les entreprises, selon lui, doivent fournir des exemples concrets des avantages de la liberté des échanges, en particulier pour les PME. Il a également incité l’UE à réfléchir à sa procédure de ratification des accords commerciaux à l’avenir, tout en gardant à l’esprit les difficultés passées et futures concernant le CETA.

En ce qui concerne le Brexit, BusinessEurope tient à préserver l’intégrité du marché unique. M. Beyrer a précisé que son organisation espère une transition en douceur et que nous avons besoin de sécurité juridique, mais que la réalisation de ce vœu dépendra de l’attitude du gouvernement britannique.

Concernant le livre blanc de la Commission sur l’avenir de l’Europe, M. Beyrer a insisté sur le fait que, à son avis, la solution consistera en un mélange du quatrième (faire moins, mais de manière plus efficace) et du cinquième scénario (faire beaucoup plus ensemble), même si le troisième scénario (Europe à plusieurs vitesses) est également considéré comme probable.

«Nous devons veiller à ce que l’UE obtienne véritablement des résultats, notamment sur le plan des politiques économiques, pour éviter toute arrivée au pouvoir du populisme», a déclaré Pekka Pesonen, secrétaire général du Copa-Cogeca. Il a souligné que la communauté agricole est toujours en crise en raison de problématiques sectorielles spécifiques. C’est pourquoi le soutien à la croissance et à la création de nouveaux emplois dans les zones rurales est un devoir de la plus haute importance.

Il est également envisageable d’utiliser les instruments existants pour lutter plus efficacement contre le changement climatique. M. Pesonen a insisté sur l’importance de réduire les charges administratives liées à la politique agricole. Il a également rappelé que le marché unique constitue un élément fondamental pour l’avenir et le succès de l’agriculture européenne.

En ce qui concerne le commerce international, le Copa-Cogeca soutient les accords de libre-échange (ALE), tout en soulignant que, au niveau de l’UE, les règles commerciales doivent être respectées par nos partenaires extérieurs. L’organisation soutient le CETA (même si certaines questions concernant l’accès au marché doivent encore être soulevées) et participera activement à la promotion de l’accord. M. Pesonen a réaffirmé que le Copa-Cogeca défend la conclusion d’accords commerciaux multilatéraux, mais que la réalité est tout autre: le processus de l’OMC est au point mort. Pour cette raison, les accords bilatéraux sont la voie à suivre pour le moment. Il s’est également déclaré favorable à un accord de libre-échange avec le Japon et a dit espérer que les négociations aboutiront à un accord ambitieux reconnaissant l’agriculture comme un élément essentiel.

Le Copa-Cogeca met aussi fortement l’accent sur l’innovation et le développement de nouveaux produits et de nouvelles méthodes de production durables. Pour parvenir à ces objectifs, un large soutien à l’innovation est nécessaire.

En ce qui concerne l’avenir de l’UE, M. Pesonen a indiqué que son organisation appelle de ses vœux la défense du sens d’appartenance communautaire à l’Europe. Une politique agricole commune solide, soutenue par un financement efficace, demeure, à ses yeux, l’élément clé pour la réalisation de cet objectif.

Nous devons tous insister davantage sur l’importance de l’Europe et de la cohésion, cela relève de notre responsabilité commune, a déclaré Christian Verschueren, secrétaire général d’EuroCommerce. Les performances économiques de l’UE, sa convergence économique et la stabilité de la monnaie sont en tête de liste des priorités de son organisation.

Le secteur du commerce de détail doit s’adapter aux évolutions en cours: 30 % des emplois de celui-ci risquent d’être affectés par la numérisation. Cela pourrait entraîner la création d’autres emplois hautement qualifiés. Par conséquent, le marché du travail doit à tout prix s’adapter: il s’agit de s’assurer que les personnes acquièrent les compétences nécessaires pour affronter la révolution numérique.

Le marché unique est une clé de voûte du commerce européen. Malheureusement, dans un certain nombre de pays de l’UE, nous assistons aujourd’hui à la prise de mesures protectionnistes visant à éliminer certains acteurs du marché, allant ainsi à l’encontre des principes du marché unique. Selon M. Verschueren, bien que l’idée de céder davantage de pouvoirs à la Commission européenne soit impopulaire actuellement, EuroCommerce lui exprime son soutien dans la lutte contre les pratiques qui entravent le marché unique. Une meilleure application de la législation régissant ce dernier serait appréciée.

Dans certains domaines, tels que la durabilité et le gaspillage alimentaire, le milieu des entreprises pourrait montrer la voie à suivre. Toutefois, les employeurs doivent veiller à ce que ce genre de politique garantisse une concurrence équitable sur la scène internationale, et à ce que les partenaires extérieurs n’obtiennent pas d’avantages concurrentiels en se détournant du programme ambitieux de développement durable.

M. Verschueren a également débattu de la transformation de la PAC et de l’éventualité d’une orientation vers des solutions fondées sur le marché. Si cette configuration semble probable, l’UE doit s’assurer que les communautés qui la constituent s’y adaptent bel et bien.